La cité
Il fait chaud, c'est le début de l'été, quelques abeilles butinent de fleurs en fleurs. Dans ce lieu champêtre, un chemin de traverse, parsemé de rires d'enfants, borde une modeste ferme. Au loin, un jeu de construction semble posé sur le sol. Les gamins, intrigués, convergent rapidement vers celui-ci.
Le soir, dans les chambres, les boîtes de cubes éparpillées sur le sol, les maisons deviendront colorées. Les visages débarbouillés s'animeront avant de s'endormir paisiblement.
Le béton mange, peu à peu, l'espace naturel, tel un animal vorace. Les volets en bois de la ferme sont clos. Bientôt, il ne restera que le souvenir des fenêtres aux pots fleuris. La bâtisse a pris la clé des champs. Les enfants ressentent son absence. Les animaux du lieu partageaient les jeux imaginaires et les secrets des gamins en culottes courtes.
La cité se réveille aux premières heures du jour, Une à une, les lumières éclairent les maisons mitoyennes. Les abeilles ont quitté les lieux depuis quelques mois maintenant, d'autres , « en habits de labeur », les ont remplacées. Elles s'en vont « butiner » à l'usine de poissons. Certains jours, une chape océane, enveloppe le carré de maisons, dans une sorte d'appropriation.
L'usine, c'est toute une vie, celle de gens simples, concentrée dans un espace restreint.
Il fait chaud, c'est le début de l'été, la grande cheminée domine toujours le lieu. La ferme a disparu depuis longtemps. La rivière se souvient des rires d'enfants, déferlant en cascades, sur le chemin des écoliers. Le cours d'eau porte aussi l'empreinte de l'usine. Certains jours, des dos de cadavres sont à têtes de poissons.
Le vent continue de souffler, mélodieusement dans les arbres, parmi ceux qui tiennent encore debout. Il nous ramène l'écho d'une enfance où le cochon se pendait aux arbres, près du corps de ferme, sous le regard du chien et du chat de la maison.
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