PEPE
Dès l'aube, il enfourchait sa vieille bicyclette. Il fixait, à l'arrière-selle, un sac en jute contenant ses outils. Hiver, printemps, été, automne, tous les temps défilaient au rythme du pédalier. Les vaches voyaient passer un pépé à casquette, le pantalon serré avec des pinces. Les braves jambes s'activaient. L'homme courageux portait, à la force de ses pieds, un modeste gagne-pain. Quarante kilomètres, chaque jour parcourus, le petit menuisier connaissait les contours, les virages et les droites, les bosses et les creux. Arrivé au domaine, son regard pétillait au visage, sapoudré de farine' du meunier. Il observait ensuite, avec soin, le moulin qu'il venait réparer.
Pierre rentrait le soir, riche de son labeur, ouvrait son atelier et sa boîte à trésors. Penché sur l'établi, maniant avec respect ses outils, il les nettoyait avec précaution.Et l'odeur de sciure qui nous montait au nez, tendre parfum d'enfance d'un fort noble métier.
Nous faisions des bêtises, déplaçant ses "jouets". Il courait après nous, quelques orties en main, juste pour nous faire hurler. Petits enfants espiègles, mettant le "souk" parfois, dans son royaume en bois. Alors pour se venger, quelques pincées de sel, dans le café au lait et son rire éclatait à nous voir grimacer.
Des parfums d'enfance, en ce beau jour d'été, me chatouillent le nez.
"Pépé", le bois était sa flamme, un meuble respire son âme.
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